Da LeTemps.ch l Samedi, on fête les 35 ans du tunnel routier du Gothard, inauguré le 5 septembre 1980. Vendredi, les partisans d’un deuxième tube (en votation en février 2016) ont intensifié leur campagne et emmené les journalistes au cœur du Gothard, lors d’un voyage médiatique orchestré par l’Union suisse des arts et métiers (USAM).
Rendez-vous était donné tôt le matin à Lucerne. Dans le bus conduisant le groupe à Göschenen, le directeur de l’USAM, Hans-Ulrich Bigler, a ouvert les feux en expliquant pourquoi il fallait construire un tunnel de réfection. «Nous rénovons le tunnel du Gothard pour la Suisse et son économie, et non pour le trafic de transit», a-t-il déclaré. Environ 8% seulement du trafic au Gothard est attribuable au transit de marchandises à travers la Suisse.
A Göschenen, le soleil est au rendez-vous, le café et les croissants aussi. Les journalistes sont reçus à la Centrale d’intervention du tunnel routier, où le directeur de l’Office fédéral des routes (Ofrou), Jürg Röthlisberger, défend le projet de la Confédération, à savoir la création d’une deuxième galerie pour pouvoir assainir en toute tranquillité la première, sans interruption du trafic.
«Nous construisons sans créer de bouchons», a-t-il expliqué, en citant d’autres exemples comparables de réfection, comme le tunnel du Belchen (construction d’un troisième tube). Quant à l’alternative d’une autoroute ferroviaire courte entre Erstfeld et Biasca, elle représente certes «une solution intéressante» et praticable, mais «pas durable», selon l’Ofrou.
Aspect sécuritaire
Car si en 2020 la Nouvelle Ligne ferroviaire alpine (NLFA) aura encore la capacité nécessaire pour accueillir les poids lourds chargés sur le rail, ce ne sera plus le cas trente ans plus tard, lorsqu’un nouvel assainissement s’imposera.
L’aspect sécuritaire était au centre de l’attention à la Centrale d’intervention de Göschenen, chargée du contrôle de la circulation et des interventions dans le tunnel routier. Les visites organisées dans la salle de contrôle, avec ses dizaines d’écrans où défilent les images prises par les caméras dans le tunnel, et au service du feu, démonstration de camion de pompier à l’appui, faisaient partie des attractions de la journée.
Les responsables de la police routière et du service du feu, l’Uranais Oliver Schürch et le Tessinois Fabrizio Lasia, ont illustré les risques dus à la circulation bidirectionnelle et à l’absence de bandes d’urgence, et les difficultés d’intervention en cas d’accident ou d’incendie. Interrogés sur leur opinion quant au doublement du tunnel, tous deux se sont pourtant montrés circonspects.
Oliver Schürch en particulier marchait sur des œufs, car les autorités de son canton sont opposées au projet de la Confédération. En 2011, la population uranaise a rejeté la proposition d’un deuxième tube, et c’est dans ce canton que le référendum déposé en janvier dernier a recueilli, proportionnellement, le plus de signatures.
Position des Tessinois
Au sud du Gothard, la position des Tessinois semble avoir évolué au cours des années. Alors qu’en 2004 ils rejetaient, tout comme les Uranais, le doublement du tunnel, deux tiers d’entre eux y étaient favorables en 2011 selon un sondage; mais 10% des paraphes du référendum provenaient du canton italophone, laissant suggérer que l’adhésion au projet n’est plus aujourd’hui aussi compacte.
Après une visite rafraîchissante dans la galerie de sécurité longeant le tunnel, accompagnée d’une séance photo pour l’ex-conseiller national uranais Franz Steinegger (PLR), le voyage a continué en direction d’Airolo, et plus précisément vers sa fromagerie (à risque sans deuxième tube, selon son patron).
Là, à côté de la dégustation de fromages locaux, le président du gouvernement tessinois Norman Gobbi a exprimé les craintes de son canton d’être coupé du reste de la Suisse: «Nous ne voulons pas être Tessinois seulement en été», a-t-il répété en reprenant un slogan de 1964 en faveur de la construction d’un tunnel routier.
L’ultime étape conduisait les médias à Erstfeld, qui devrait accueillir la moitié des quais de transbordement (l’équivalent de 22 terrains de football au total) pour le trafic lourd si la solution d’une autoroute ferroviaire devait finalement l’emporter. Sur une passerelle dominant le chantier d’AlpTransit, Franz Steinegger a eu le mot de la fin: «Le problème pour Uri n’est pas le deuxième tube, mais au contraire le fait de n’en avoir qu’un seul.»
TESSIN Samedi 05 septembre 2015, Barbara Knopf Bellinzone