Articolo pubblicato nell’edizione di giovedì 4 aprile 2019 di Le Temps
Après Zurich, Lucerne et Bâle-Campagne, les inquiétudes climatiques marqueront-elles les élections du canton italophone? Rien n’est moins sûr. Classe politique et observateurs s’attendent plutôt à ce que le scrutin consacre l’implantation de la Ligue des Tessinois
Lors des élections tessinoises ce dimanche, les Verts profiteront-ils également de la vague qui a déferlé à Zurich, à Lucerne et à Bâle-Campagne en lien avec les revendications environnementales? Rien n’est moins sûr. «Ces préoccupations sont très présentes au Tessin aussi, mais la culture et les comportements de vote sont différents», explique Nicola Schoenenberger, co-coordinateur des Verts tessinois. On ne peut pas faire de pronostics en se basant sur les résultats au nord des Alpes, estime-t-il. «Là, Verts et socialistes sont majoritaires dans de grandes villes et les écologistes sont présents dans les exécutifs cantonaux. Ce n’est pas le cas au Tessin, où nous n’avons encore que 6 députés sur 90 au parlement.»
En revanche, ce qui apparaît clairement pour les élections du 7 avril, c’est la réaffirmation du pouvoir de la Ligue des Tessinois. Les sondages prévoient le statu quo au gouvernement avec la réélection de deux léguistes, un PLR, un PDC et un socialiste. L’alliance scellée avec l’UDC devrait garantir à la Lega deux sièges au Conseil d’Etat pour la troisième législature depuis 2011.
Un électorat très hétérogène
Près de trois décennies après sa fondation comme mouvement d’opposition – anti-frontaliers, anti-establishment et anti-européen – l’institutionnalisation du parti de la droite populiste se renforce. Cofondée en 1991 par l’éloquent Giuliano Bignasca – la voix et le visage de la Lega jusqu’à sa mort, en 2013 – la Ligue des Tessinois est une sorte d’ovni dans la politique suisse.
Dirigée par une poignée de ténors, absente ailleurs qu’au Tessin, elle occupe deux des huit sièges tessinois au Conseil national, avec Lorenzo Quadri et Roberta Pantani, accueillis dans le groupe UDC. «Nous sommes un mouvement cantonal, explique la seconde. Notre priorité est et sera toujours le citoyen tessinois. Nos thèmes et nos combats sont bien connus: le travail, la sécurité, le territoire et l’identité. Nous les développons aussi sur le plan fédéral, sans céder aux diktats de l’UE.»
La Lega est née parce qu’il fallait donner une alternative politique aux Tessinois «qui en avaient assez du pouvoir écrasant des partis traditionnels», poursuit Roberta Pantani, ajoutant que l’électorat léguiste, très hétérogène, ne peut être classé selon les canons politiques classiques. Les objectifs sont les mêmes aujourd’hui qu’hier, mais avec une différence tout de même: «Désormais, avec une majorité relative au gouvernement, nous avons la possibilité réelle de changer les choses.»
Contestataires dans le système
On assiste en effet à une phase d’intégration poussée de la Lega, confirme Oscar Mazzoleni, professeur à l’Université de Lausanne (UNIL) et auteur d’un ouvrage sur le régionalisme tessinois*. «Elle a du poids, de l’influence. Elle fait maintenant partie du système. Si la Lega a changé, elle a également transformé le système.»
Le politologue attribue une partie importante de son succès à son hebdomadaire du dimanche. Il Mattino della domenica est lu par 70 000 à 80 000 personnes, sur une population cantonale qui compte 350 000 résidents. «Depuis 1990, cet hebdomadaire mène une campagne politique permanente qui, au fil des ans, a façonné une manière de penser les problèmes et les solutions.»
La Lega a modifié les règles du jeu et imposé aux autres formations politiques une bonne part de son agenda régionaliste, observe Oscar Mazzoleni. «Elle a réussi à inhiber ses adversaires et à faire passer le message selon lequel il est risqué de la combattre en termes de soutien électoral.» Tous prennent pour acquis qu’elle va remporter deux sièges au Conseil d’Etat ce dimanche, note-t-il. «Les autres partis luttent entre eux.»
Affrontement policé
Cette campagne électorale reflète l’évolution de la Ligue des Tessinois, constate-t-il. «Le ton des partis et des candidats a évolué. L’affrontement est moins direct, plus poli que par le passé.» Faute d’un véritable programme électoral, la Lega a axé sa campagne sur la visibilité et la popularité de ses conseillers d’Etat: Norman Gobbi, 42 ans, directeur du Département des institutions, dur à cuire, extraverti et candidat malheureux de l’UDC aux élections fédérales en 2015, et Claudio Zali, 57 ans, chef du Département du territoire, ancien juge, politique atypique, plus réservé, remarqué pour son penchant environnementaliste.
Oscar Mazzoleni note encore que lors de cette campagne, la Lega a moins parlé des frontaliers, qui sont «les électeurs de la Ligue de Matteo Salvini, au pouvoir en Italie et en Lombardie». Autrement dit un «cousin et partenaire avec qui elle essaie de maintenir de bons rapports de voisinage».